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Ça vient...

il est temps paraît-il de rédiger une biographie de mon père. C'est du moins ce que disent mes fils.

En même temps, je viens d'avoir 70 ans. Mine de rien, ça change les choses. Pas en passant. Comme tous les évènements importants de la vie, autant on va les attendre avec impatience, autant on est déçu le lendemain car le temps a passé au même rythme que d'habitude et on se retrouve le lendemain peu différent que la veille. Ainsi pour les 70 ans. Mais là, c'est dans la tête que ça s'imprime. 70 ans, c'est une frontière. On beau avoir envie de faire le fanfaron comme d'habitude "je vais bien, je suis en forme, mes neurones fonctionnent à peu près bien...", le cap est passé à partir duquel on n'est plus ni jeune, ni même d'âge mûr. On est dans la première étape de la vieillesse.

D'ailleurs les interlocuteurs ne s'y trompent pas: "pour 70 ans, vous en faites des choses" voire "70 ans, vous ne les faites pas...". Bien sûr que je ne les fais pas, ils se font tout seuls, presque à mon insu. Du coups les petits tracas de base prennent une autre dimension. Fatigue après un effort important, petites douleurs dans les articulations, sommeil parfois approximatif, mais mon vieux (comment tu dis ? ah c'est une façon de parler !) c'est ton âge qui parle. La machine donne des signes de désorganisation, pas encore rédhibitoire, mais ça vient.

Sur le plan psychosomatique, comme je dis, c'est l'entropie qui se manifeste au niveau du corps, et c'est la perception nouvelle de la chose qui agit dans le psy. je fais l'expérience de la vieillesse débutante.

Oh, je n'y pense pas en permanence. Heureusement. Mais chaque fois qu'une manifestation organique se fraie un chemin jusqu'à mon cortex, signalant un déficit d'adaptabilité spontanée, elle se colore de la qualification de manifestation de la vieillesse. Devant la glace le matin, je vois toujours la même personne. Je ne l'ai pas vue changer vraiment, tellement les transformations ont été progressives, ne modifiant pas d'un jour à l'autre l'image que me renvoie le miroir de façon suffisante pour que je m'en aperçoive. Sauf (quand même) lorsque, à l'improviste, je me vois dans une vitrine en passant dans la rue. Je me surprends alors à m'interroger in petto : c'est moi ça, ce vieux bonhomme à la barbe blanche et au crâne complètement dégarni ?

Chacun conserve de lui longtemps une image qui ne se ternit pas avec le temps. Il faut ces satanées vitrines pour être ramené à la réalité. Et puis le regard des autres, mais ça on s'en méfie depuis toujours, alors ça ne compte pas vraiment. Ce n'est pas le regard des autres qui provoque un changement dans la perception que l'on a de son image, ce sont les mots qu'il emploie. Parce que l'image que l'on a de soi est complètement construite par son psy, sans rapport avec la réalité qu'en perçoivent les autres. Heureusement d'ailleurs. Ça permet de passer travers les gouttes. Si l'on est réellement contrefait ou repoussant, on peut quand même s'inventer une image acceptable qui permette de vivre, de se vivre dans toutes les fantasmagories qui accompagnent le quotidien. Ce sont simplement les autres qui sont à blâmer de leur incapacité à vous accepter comme vivable. C'est une nécessité de survie que cette reconstruction d'image. L'unité psychosomatique ne peut correctement vivre qu'en intériorisant une image de soi acceptable. Tout les reste n'est que succédané de miroir. Il suffira de ne pas solliciter le miroir, voire de le casser s'il insiste pour imposer l'image qu'il renvoie.

Alors 70 ans ce n'est pas ça qui va changer quelque chose à l'image.

Par contre, on peut intégrer cette donnée nouvelle et en tirer des conclusions raisonnables sur la conduite à tenir, les comportements à adopter, les projets à construire.

Du coup je me mets à cette biographie.

Mais pas comme on l'imagine. Rappelons-nous l' "Éloge de la fuite", le livre qui a fait connaître et reconnaître Henri Laborit. Au départ, il avait été contacté par un directeur de collection pour écrire une autobiographie suivant un canevas imposé chapitre après chapitre. Le père des "comportements" a pris le parti de ne tenir aucun compte de ce thème imposé tout en gardant l'intitulé des chapitres successifs, ce qui confère au livre un petit aspect surréaliste.

Alors je veux bien faire une biographie de mon père, mais pas comme un historien. Étant son fils, je vais raconter ce qu'il fut pour moi, ce que je sais de sa vie non pour avoir étudié des sources historiques, mais pour avoir été témoin et produit de cette vie qu'il s'agit de raconter. Du coup, cette biographie de mon père ne pourra être qu'une partie de mon autobiographie. Du coup, elle sera accompagnée de multiples tranches de biographie des êtres qui, dans le chevauchement des psy caractérisant les relations inter individuelles, ont été les auteurs, partiels mais complémentaires, de ma personnalité, de mon unité psychosomatique. Ma mère bien sûr, mes parrain et marraine qui m'ont en très grande partie "élevé", mes maîtres, de l'école primaire à l'université, mes grands parents plus ou moins éloignés, y compris ceux que j'e n'ai pas connus, mes amis, ma compagne, mes enfants, et généralement tous ceux avec qui j'ai été en relation et que je me rappelle. Aucun d'entre eux n'est anodin dans ma vie, aucun ne peut s'affranchir d'une responsabilité si partielle soit-elle dans les traits de caractère qui font ma personnalité.

C'était une introduction à ce qui va progressivement se construire au fil de mon inspiration. patience mes fils ! Ça vient !

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